Interview : Zulficarth Mathilde ALLOUGBIN, des bureaux pour les volières
Zulficarth Fawzia Alake Modjissola Mathilde ALLOUGBIN épouse DANSOU, jeune femme entrepreneure béninoise, évolue dans l’élevage des Cailles dans son pays natal, le Bénin. Sa ténacité est un bel exemple pour sa génération et celle à venir. Après ses études universitaires, elle obtient un poste dans une entreprise où elle a gravi vite les échelons. Malgré tout, elle décide de quitter les bureaux pour devenir coturnicultrice. Le succès, elle l’a connu. L’échec, elle l’a côtoyé. Fawzia Mathilde nous parle de ses affaires dans cette interview. Bonne lecture!
Un bref aperçu sur votre parcours académique et professionnel?
Je suis née dans la capitale du Bénin (Porto-Novo). Après mes études primaires et secondaires dans ladite ville, j’ai eu à faire des études universitaires et je suis titulaire d’une licence en sciences de gestion et commerce international. Je suis mariée et mère de trois charmants enfants.
Après mes études, j’ai travaillé sept ans dans une entreprise, où j’ai eu à gravir les échelons petit à petit. Grâce au travail acharné, je quitte le poste de commerciale pour celui de chargée de produits, puis chef service commercial, coordinatrice adjointe de zone. C’étaient des moments formidables. J’aimais beaucoup le monde de l’entrepreneuriat. Je démissionne de mon poste de travail pour l’élevage des cailles.
Vous êtes femme entrepreneure, vous êtes dans l’élevage des Cailles. Pourquoi le choix de ce secteur d’activité ?
Je suis passionnée par les animaux naturellement, peut-être parce que je les ai côtoyés toute mon enfance car mon papa avait une ferme et on y allait souvent. Pour les cailles, j’adore le bruit qu’ils font au réveil le matin ou quand il y a la présence d’une personne dans leur enclos.
J’ai perdu près de 700 cailles. À un moment donné, j’ai pensé à une affaire mystique, puisque chaque jour, on ramassait des cailles pour enterrer.
Vos débuts, parlons-en!
Tout juste après ma démission de mon travail, je me suis mise à réfléchir pour voir ce que je pouvais faire, car vu les expériences que j’ai eues, je n’avais plus le désir de travailler pour quelqu’un d’autre. Aussi, mon beau-père, paix à son âme, me mettait tellement la pression pour que je fasse quelque chose. Vraiment, j’ai commencé avec rien du tout. J’avais juste une cage qui ne pouvait prendre que 30 cailles. J’avais 25 femelles et cinq mâles. Je voulais constituer ma propre colonie, donc je récupérais les œufs germes tous les trois jours, ce qui me faisait au moins 70 que j’envoyais dans la couveuse en moins de 3 mois, j’avais déjà plus de 1000 cailles. Les débuts étaient très peu gracieux pour moi mais j’avais l’aide et le soutien de mes proches, principalement de mon défunt beau-père.
Quel est le plus grand échec que vous avez enregistré dans cette entreprise ?
Vous savez, il n’y a jamais de réussite sans échec. Une petite négligence a failli nous faire mettre la clé sous la porte car on a connu des pertes incalculables. Un des employés par inadvertance si je peux le dire a introduit un médicament périmé dans la citerne d’eau des animaux. On a traîné ça sur trois mois environ. Cette faute a impacté énormément l’entreprise. J’ai perdu près de 700 cailles. À un moment donné, j’ai pensé à une affaire mystique, puisque chaque jour, on ramassait des cailles pour enterrer. C’est après analyse de leur repas et leur eau de consommation que j’ai comprise que c’était un comprimé périmé dans l’eau qui en était à l’origine.
Comment avez-vous pu surmonter cela ?
Sincèrement, je n’avais plus du tout envie de continuer mais j’avais déjà des clients et le marché était favorable. Je ne pouvais plus reculer surtout pour les œufs des cailles. J’avais aussi le soutien de mon mari et celui de son feu père. Ils ont cru en moi et avec la grâce d’Allah, on a pu repartir sur de bonnes bases à nouveau.
Si quelqu’un doit venir dans ce monde d’élevage et de vente de cailles, quel conseil lui donnez-vous ?
Je lui demande de foncer mais seulement s’il aime ça, pas parce qu’il y a beaucoup de travail à faire, ils ne sont pas du tout difficiles à élever mais quand on leur donne de l’amour ils le rendent en retour. La viande de caille est en train de gagner la place car c’est une viande blanche et qui a beaucoup de vertu. Lorsque vous avez de l’amour pour ce que vous faites, vous y arrivez.
Et si quelque chose devrait être fait pour mieux prospérer, que feriez-vous ?
Pour moi, j’ai appris de mes erreurs. À chaque fois que je tombe, je me relève. J’ai beaucoup d’expérience désormais. Je ne regrette pas mon passé mais c’est une bonne école. Actuellement, je cherche des finances pour agrandir la ferme car je veux avoir un grand abattoir dernière génération, de grands fours à bois et un dortoir pour les employés.
Vos cailles sont vendues abattues ou vivantes ?
On les vend abattues et vivantes aussi. Nous constituons des colonies pour ceux qui veulent se lancer dans le domaine, nous couvons aussi les œufs pour d’autres clients.
Un dernier mot?
Je remercie l’équipe d’AfrikElles pour le travail que vous abattez pour mettre la lumière sur les femmes entrepreneures d’aujourd’hui. Nous avons vraiment besoin de visibilité.
Je demanderai à mes jeunes frères et sœurs qui voudraient entreprendre d’oser. C’est vrai, rien n’est facile dans la vie mais si vous avez de la détermination, la persévérance et l’amour de ce que vous voulez faire, on triomphe toujours.
Je profite aussi pour remercier quelques personnes qui me sont chères. Il s’agit tout d’abord de mon époux DANSOU Vianney, de ma mère, ma belle-mère et mon mentor Mme Alida AHOUANDJINOU.
Propos recueillis par Espoire TAWI