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TOGOCOM – FORFAIT EN HAUT

DOSSIER: FILMER DES ÉBATS SEXUELS, LES JEUNES FILLES SONT-ELLES ACTRICES OU VICTIMES ?

La banalisation de l’acte sexuel prend une proportion importante dans la classe juvénile depuis quelques années déjà. Pratiquement chaque année, ce que les anglophones appellent  « Sextape »  vient au devant de l’actualité et alimente les débats, faisant parfois le choux gras des médias sociaux. Deux tourtereaux qui font un plan à trois. Détrompez-vous, la troisième personne n’est qu’une caméra de téléphone portable. Pourtant, à la base, il ne s’agit pas du tournage d’un film à caractère sexuel. Il s’agit principalement   d’un moment d’intimité entre deux partenaires qui se connaissaient. Et si c’était un film en production, il serait bien évidemment interdit aux moins de dix-huit ans. Mais non ! Les vidéos font le tour des réseaux sociaux, visualisées par tous les âges.

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Cette semaine, la toile s’est enflammée et pour cause, le phénomène refait surface. Et c’est la Côte d’Ivoire, le pays hôte. Le jeune homme à l’origine de la diffusion des vidéos est un Togolais vivant en Côte d’Ivoire. Dans des séquences vidéos diffusées intentionnellement ou malencontreusement, on y voit un jeune homme et une jeune fille en plein acte sexuel devant la caméra de leur téléphone. L’attitude de la jeune fille en position couchée dénote clairement le fait qu’elle soit bien consciente de la présence de la caméra. Un véritable tournage ! Ceci n’est pas une première. Le phénomène a atteint plusieurs pays africains ces dernières années.  Des jeunes qui filment leurs ébats sexuels et leur chef-d’œuvre se retrouve en avant-première. Filmer des ébats sexuels, cela suscite véritablement un débat « sexuel ». 

 

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Les petites filles aujourd’hui n’ont plus de temps à perdre. Elles voyagent avec l’âme des hommes. Ça tire à balles réelles.

 

 

Comment ce phénomène qui bafoue l’intimité, désacralise la sexualité et met à dos la dignité humaine peut-il s’expliquer ?

 

Si les gens ont une idée claire de la question des ‘nudes’ que des partenaires peuvent utiliser à des fins de chantage, d’intimidation, de menaces à caractère vindicatif pour nuire autrui, c’est difficile de comprendre le fait que des ébats sexuels soient diffusés par l’un des partenaires sachant bien que son image s’y trouve ou qu’on pourrait facilement l’identifier. Pourquoi, généralement, ce sont les jeunes filles ou femmes qui sont clairement mises en avant dans ces genres de vidéos ou d’images ? Filmer l’acte sexuel, un simple fantasme ou un plan démoniaque pour anéantir moralement au moment opportun ? Les jeunes filles sont-elles actrices ou victimes de ce phénomène ? Les questions sont légions. Pour comprendre cet inquiétant phénomène de société, nous avons donné la parole à des jeunes.

Pour Kader, un jeune Ivoirien, doctorant à l’Université de Lomé, il ne faut pas chercher midi à quatorze heures, les femmes sont loin d’être victimes, car, pour lui, les deux partenaires sont engagés dans une quête de fantasmes : « L’idée de se filmer lors des ébats sexuels…peut provenir des deux partenaires, bien évidemment, d’un commun accord. Cette démarche vise à immortaliser le fantasme.  Dans le cas où la femme est filmée à son insu, elle est peut-être une victime.  Mais dans le premier cas que je viens de citer, elle est une actrice. Les petites filles aujourd’hui n’ont plus de temps à perdre. Elles voyagent avec l’âme des hommes. Ça tire à balles réelles. »

Plus clairement, il se trouve que la fille peut être une victime dans un contexte donné. Mais au même moment, la chasse aux abonnés avec des likes (aimer une publication) et des vues peut expliquer ce phénomène : « Aussi, la fille qui fait le buzz actuellement a fait un direct où elle demande aux gens de s’abonner à sa page s’ils souhaitent avoir plus d’explication.  Dans la vidéo, c’est elle-même qui positionne sa caméra pour se filmer lors des ébats. », a-t-il précisé.

Toujours, le contexte peut définir le statut des filles dans ce phénomène, à en croire Essao, un leader d’opinion et éducateur : « Les femmes ou jeunes filles sont actrices au moment où elles sont complices, c’est-à-dire, elles acceptent et participent au tournage. Le cas contraire, elles sont victimes », a-t-il conclu.

c’est impoli et dégueulasse de filmer une personne à son insu et surtout dans son intimité.

 

 Pour Victoire, jeune entrepreneure, ses sœurs n’ont aucune raison de se victimiser. : « Je pense que c’est consentir à un jeu d’acteurs. Et jouer à la victime », a-t-elle affirméElle revient à la charge, et pointe du doigt le consentement passif des jeunes filles à travers des interrogations : « Du côté de la femme, quand on filme et que tu sais, mais que tu ne t’y opposes pas, c’est que tu aimes. N’entendons-nous pas dire que : Qui ne dit mot consent ?   Ou Quand on refuse, on dit NON ? », s’interroge-t-elle avant de sonner définitivement le glas avec une phrase toute crue : « Elle était d’accord donc, pas de victimisation ». Albertine, éducatrice, rejoint Victoire: « Je dirai que les femmes ou jeunes filles sont actrices, du moment où, étant bien conscientes qu’on les filme, elles ne s’y opposent pas. Et victimes si elles ont été filmées sans consentement, sans qu’elles sachent même qu’elles ont été filmées. »

Si ce phénomène devient de plus en plus banal et utilisé parfois consciemment pour des finalités de la quête de popularité sur les réseaux sociaux, en cherchant à « créer le buzz » selon l’expression qui a pignon sur rue chez les jeunes, on ne doit pas perdre de vue son caractère délictuel comme le précise d’entrée, Jeanne, Étudiante : « Filmer son ou sa partenaire sans son consentement est un délit. Partager la vidéo sans le consentement de son ou sa partenaire l’est aussi, peu importe si la personne était consentante pour filmer la vidéo. Montrer celle-ci à ne serait ce qu’une seule personne est une violation de la vie privée de toute personne sur la vidéo. On peut consentir à filmer une vidéo, mais ne pas consentir à la publier », explique-t-elle.  De loin, elle voit de très mauvais œil le fait de filmer autrui sans son approbation : « c’est impoli et dégueulasse de filmer une personne à son insu et surtout dans son intimité. Ce sont des jeux de couple inoffensifs pour certains et les publications sans l’autorisation de toute personne impliquée est inadmissible. »

 Ces genres de vidéos sont utilisés même à titre de chantage, souligne Aimée, Étudiante : « Elles sont les victimes et les actrices. Tu le fais un jour (Laisser filmer), le gars te fait du chantage avec ça ». En analysant les propos de Mlle Aimée, c’est à croire que très souvent, ce sont les filles qui sont exposées. C’est d’ailleurs ce qui agace Victoire, jeune entrepreneure : « Mais ce qui m’agace, c’est que les filles ne postent les nudes des hommes. En tout cas, je n’ai pas encore appris cela. Pourtant, ils envoient aussi. Est-ce de la méchanceté ? Ou parce que la femme est plus blâmée dans ces histoires, donc on en profite ?» s’interroge-t-elle. Bélinda, élève, n’est pas d’avis: « Pas seulement la jeune fille ou femme comme victime éventuelle. L’homme peut être victime parce que, si la femme a la main sur les vidéos filmées, elle peut menacer l’homme en lui imposant tout ce qu’elle veut de l’homme. C’est dans les deux sens tout de même » conclut-elle.

Tout compte fait, parlant des jeunes filles, il se dégage qu’elles peuvent être à la fois actrices et victimes. Le contexte détermine cela.

Sans doute, les réseaux sociaux ont fortement contribué à l’explosion de ce phénomène de partenaires qui se filment lors des ébats intimes. De plus, nombreux ignorent qu’un téléphone connecté est une véritable arme de guerre chargée qu’ils manipulent. La culture du bon sens, la sacralisation de l’acte sexuel, la préservation de la dignité humaine doivent refaire surface dans cette société qui banalise tout. L’éducation depuis les cellules familiales, dans les écoles et une véritable sensibilisation peuvent être des approches de solutions.

Le pouvoir public doit aussi veiller pour faire la toilette publique en sanctionnant les auteurs de cette « pollution sexuelle », surtout que des dispositions juridiques condamnent déjà l’attentat à la pudeur. Le code pénal du Togo est un exemple concret.

Innocent Komlan WOTOGLO

 

 

 

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