Des majorettes pour accueillir au Togo: Genèse
L’accueil par des majorettes n’est pas nouveau. C’est une pratique qui existait il y a très longtemps. En effet, sous le régime du parti unique, la Corée du Nord avait instauré des danses populaires. Ce sont ces danses qui ont donc été empruntées à la Corée du Nord et plus tard au Zaïre, qui à son tour avait entamé une politique d’authenticité.
« C’est du Zaïre qu’il y a eu ce phénomène d’animation pour chanter les louanges du chef de l’État et il s’est répandu au Togo. Les majorettes étaient des jeunes filles qu’on choisissait. On leur apprenait des slogans pour louer les autorités, surtout Mobutu Sese Seko, ancien président de la République démocratique du Congo, un ami du président Gnassingbé Eyadema quand il était en visite au Togo. Après, la pratique s’est étendue au président Eyadema « , nous a renseigné M. Kombaté Néné Nawabe Michel, ancien inspecteur de l’éducation nationale togolaise.
Dans la même logique, d’après une source fiable, la présence des majorettes à l’accueil s’est inscrite dans un contexte du culte de la personnalité qui a marqué les régimes à parti unique. Le Togo en faisait partie, puisque des majorettes composées principalement de jeunes filles chantaient le nom et la gloire du Président de la République à l’époque, SEM Gnassingbé Eyadema.
« Quand une fille présente un bouquet de fleurs à un chef d’État ou à un invité c’est mieux qu’un petit garçon ».
Nous vivons dans une société où les femmes servent et accueillent. Cette situation a, sans l’ombre d’un doute, influencé le choix des filles comme majorettes. D’une manière ou d’une autre, la société était en train d’enseigner à la petite fille son rôle dans la société. Peu de choses ont changé aujourd’hui. Dans les bars, les femmes sont toujours des serveuses et les hommes occupent plus les rôles de managers. À la question de savoir pourquoi les petites filles sont préférées aux petits garçons dans la sélection des majorettes, notre patriarche répond: « Quand une fille présente un bouquet de fleurs à un chef d’État ou à un invité, c’est mieux qu’un petit garçon. Quand on a choisi les belles filles, c’est pour qu’elles soient beaucoup plus présentables que les hommes« , poursuit Kombaté Néné Nawabe Michel.
À propos des majorettes togolaises, notre source nous apprendra plus tard que malgré leur nombre minime, il y’ avait aussi des garçons au sein des groupes d’animation. Le plus populaire était l’ARETO (un groupe choc d’animation de la révolution togolaise). « On choisissait les belles filles et on leur apprenait des danses. Il y avait aussi quelques hommes mais ils étaient moins visibles que les majorettes, mais tous faisaient le même travail« , a-t-il tenu à préciser.
Le choix des majorettes, un fruit de la division sexuelle du travail ?
Le choix des femmes comme majorettes pourrait être considéré comme un phénomène social. En fait, ce sont tous les courants d’opinion ou mieux de conviction qui ont conduit à ce choix. Selon une sociologue togolaise, qui a requis l’anonymat, le choix des petites filles en tant que majorettes résulte de la division sexuelle du travail. En d’autres termes, c’est la société qui a fait une division qui refléterait la position des femmes envers les hommes.
Après la période des majorettes, bonjour des hôtesses
L’accueil par des majorettes a progressivement disparu. Il tomba dans l’oubli et a pu réapparaître sous une autre forme. Aujourd’hui, on parle plus des hôtesses. À Lomé, plusieurs sociétés événementielles proposent des services aux jeunes filles pour accueillir les invités. Nous avons fait un petit sondage sûr quelques-unes et plus de la moitié réservent les services d’hôtesses uniquement aux jeunes filles avec des mensurations très précises. « Parfois, les hommes m’accueillent et j’aime bien ça. Mais c’est souvent plus agréable de voir les femmes. Actuellement, beaucoup de choses se féminisent. Pour communiquer, on va miser plus sur les femmes que sur les hommes, parce que c’est commercialisable et attractif », a confié Timothé, communicateur.
Guides, hôtesses, majorettes, autant de qualificatifs pour traduire une seule réalité relative à l’accueil des invités par des jeunes filles. Avec toutes les attentions, ces filles qui sont fréquemment sélectionnées parmi les plus belles pourraient être exposées puisqu’elles suscitent l’attention de tout le monde. Afin de se protéger, elles devraient, selon le Père Luc Douti, faire montre de bonnes habitudes, ce à travers leurs postures et leurs habillements par exemple lors des événements.
Rappelons qu’à l’heure des revendications de l’égalité des sexes, de plus en plus de femmes accèdent à des postes de décisions, faisant d’elles aussi des personnalités avec des avantages.
Estelle Komlani
