PORTRAIT : Thérèse N. GNAKU, le fascinant parcours d’une altruiste au service de l’État et des vulnérables
Sa douceur et sa sympathie ne lui quittent jamais, peu importe les circonstances. « Je vais toujours bien par la grâce de Dieu », répond-elle quand on souhaite prendre de ses nouvelles. Elle, c’est Madame Thérèse Namalo GNAKU épouse TCHEOUAFEI. Assistante sociale, formation de base, manager, gestionnaire de ressources humaines, elle est l’actuelle Présidente du Conseil d’Administration de l’Institut National d’Assurance Maladie du Togo (INAM), point focal cellule genre au ministère de l’Administration territoire et de la décentralisation pour ne citer que ces deux fonctions. Son parcours dans l’administration publique est extraordinaire et inspirant. Elle a, au-delà de ses fonctions, accompagné, soutenu, propulsé des familles et redonné une deuxième chance à des enfants. Maman Thérèse, c’est son surnom, même à son bureau parfois. Qui est-elle ? Comment a-t-elle pu gagner et garder la confiance de ses supérieurs hiérarchiques, notamment le Ministre d’État, Ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et du Développement des Territoires ?
Début de carrière dans les carrières
Thérèse Namalo GNAKU épouse TCHEOUAFEI est diplômée, elle a une maîtrise en management et un master en Gestion des Ressources Humaines. Elle commence sa carrière en tant qu’assistante sociale à l’Office Togolais des Phosphates (OTP) en 1990. Là, elle exerça en tant qu’assistante sociale d’entreprise, où elle devait aider psychologiquement les ouvriers de cette société qui parfois sombraient dans l’alcool ou encore les assister en cas d’accidents de travail. Sa mission va au-delà de ses agents.
Disponible et empathique, elle était proche également des familles de ces ouvriers qui refusaient très souvent d’assumer leurs responsabilités. Avec son premier enfant d’à peine 5 ans, elle n’a eu aucune excuse pour mal faire son travail. Elle était d’ailleurs proche des familles de ses collègues et tentait toujours d’apporter des solutions aux difficultés de celles-ci. Dès lors, celle qui est appelée « Maman Thérèse », aura la brillante idée de fonder en 1994 une coopérative d’épargne et de crédit (COOPEC), dénommée « Coopérative d’Epargne et de Crédit des Épouses des Agents de l’OTP « CECEAO ». Cette initiative d’entraide, première en Afrique en ce temps, sera affiliée à la FUCEC- Togo. Elle a permis à ses membres d’avoir une activité génératrice de revenus, par ricochet, d’apporter une quiétude au sein des familles. « Maman Thérèse est une très gentille femme, très aimable. Malgré son statut social, elle n’hésite pas à écouter tout le monde. Très créative, elle nous a toutes incitées à faire une activité économique pour nous permettre de joindre les deux bouts, car le salaire ne suffit jamais. Pour les orphelins qui sont sans pièce d’identité, elle n’hésite pas à leur en procurer », nous a confié APETOGBO Adjovi Alice, une des épouses des employés de l’OTP. Bientôt la soixantaine, Mme TCHEOUAFEI brille toujours. « Cela s’explique par sa gentillesse et sa douceur », a conclu Mme APETOGBO.
L’initiative CECEAO résistera au temps et aux changements puisqu’en 2023, 29 ans après, elle existe encore non seulement à Hahotoe et Kpémé mais aussi à Aného et Vogan. L’épouse de l’officier TCHEOUAFEI peut aujourd’hui se réjouir des milliers de vies transformées grâce à cette initiative. Cela a d’ailleurs comblé les difficultés qu’elle a affrontées au cours de sa fonction : « Jeune mariée, j’avais mon fils ainé qui avait à peine cinq ans, et mon mari, officier de la gendarmerie, résidait à Lomé. Moi, j’étais logée à la cité à Hahotoé et ce n’est que le weekend que je devais gérer mon foyer. Il fallait également gérer mon fils », nous a-t-elle confié. L’aventure à l’OTP s’arrêtera pour Mme GNAKU, puisqu’elle est parmi les 614 personnes qui quitteront l’OTP en 2009 après la compression du personnel. Une page se ferme, une autre s’ouvre.
À quelque chose malheur est bon !
Thérèse Namalo GNAKU, après 19 ans passés à l’OTP se retrouve au chômage avec deux enfants. Fort heureusement, elle sera sollicitée par la société immobilière SIM3 qui n’est autre que l’entreprise de son jeune frère en tant que Directrice Administrative et Financière. Bref, passage dans cette société, puisque, des agents libérés de l’OTP, plus de 200 cadres seront rappelés et détachés dans d’autres services étatiques. En 2010, commence officiellement sa carrière dans la fonction publique au ministère de l’Administration territoriale. Le ministre de ce département a alors jugé plus utile d’envoyer Mme GNAKU dans un des services déconcentrés du ministère en disant ceci: « Je connais les compétences de cette dame. Si je la garde ici, le travail que les gens font en une semaine, elle le fera en une journée. Elle sera plus utile à la mairie ou à l’EPAM » souffle-t-il au Directeur administratif qui décida de la détacher à l’Établissement Public Autonome pour l’Exploitation des Marchés (EPAM).
Elle occupa tour à tour le poste de cheffe division du recouvrement puis de cheffe division des ressources humaines. En 2018, elle retourne à son ministère de tutelle en tant qu’assistante du ministre d’État, Président du conseil d’administration de l’EPAM. Son savoir-faire, sa douceur et son calme l’ont rapprochée de ses collègues de ce ministère et de son chef hiérarchique, le ministre d’État. Elle sera d’ailleurs nommée Présidente de la cellule focale genre de ce ministère.
quel que soit ce que vous avez comme diplôme, c’est la compétence sur le terrain qu’on voit
La carrière dans la fonction publique pour Mme GNAKU n’a été que patience, travail, écoute attentive qui ne sont d’ailleurs que des traits de sa personnalité : « quel que soit ce que vous avez comme diplôme, c’est la compétence sur le terrain qu’on voit », a-t-elle déclaré pour inviter les uns et les autres à la persévérance et à la productivité.
L’autre casquette que porte fièrement dame GNAKU, est celle de syndicaliste. Membre de la Confédération Générale des Cadres du Togo- CGCT depuis 1992, elle en deviendra la Secrétaire Générale adjointe. C’est sous cette coupole qu’elle sera envoyée au conseil d’administration de l’Institut National d’Assurance Maladie (INAM) pour représenter les centrales syndicales. Là, elle sera élue dans le bureau de ce conseil en tant que Vice-Présidente puis Présidente par Intérim et enfin Présidente du CA de l’INAM depuis 2015.
La maternité n’est pas que dans les trompes
« Maman Thérèse » est mère de plusieurs enfants dans le monde. Son amour et son empathie ne la laissent d’ailleurs pas loin des êtres plus fragiles, mais aussi vulnérables. Les enfants togolais ont trouvé leur mère Thérèse (religieuse connue pour ses actions personnelles caritatives). « Le nombre d’enfants que j’ai aujourd’hui, je ne peux pas vous le compter », affirme-t-elle avec sourire. Sa mission, permettre à tous les enfants, surtout ceux de moins de 14 ans de reprendre le chemin des écoles. Cette veille, elle l’a commencée pendant qu’elle était à l’EPAM avec les enfants qui travaillent ou trainent dans les rues des marchés. Avec un projet de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et en tant que Présidente de l’observatoire syndicale de lutte contre le travail des enfants depuis 2009, elle a pu intégrer une centaine à l’école ou en apprentissage. Après ce projet, les actions caritatives et de soutien ont continué. Les centrales syndicales n’ayant pas assez de ressources, elle est obligée de sortir l’argent de sa poche et, à la veille de la rentrée scolaire, solliciter l’appui de certaines entreprises qui pour la plupart lui apportent leur soutien en fournitures scolaires. Aujourd’hui, elle a obtenu le soutien d’une ONG étrangère qui trouve des parrains pour un appui financier à une dizaine d’enfants sous sa responsabilité.
Dans quelques mois, Mme Thérèse GNAKU commencera sa retraite. Elle la veut passionnante avec les enfants. Elle ambitionne de créer un orphelinat pour accueillir ces enfants sous sa responsabilité qui sont placés dans des familles d’accueil. Pour y arriver, elle s’est engagée dans la société BZZWORLD qui commercialise des produits de bien-être. Aussi, souhaite-t-elle réactiver son association ‘Gnouyaro’ (le sauveur) pour pouvoir continuer à assister les veuves, veufs et orphelins en écoute, prise en charge psychologique et en conseils aux couples et aux jeunes. Mme GNAKU est également Vice-Présidente de la Fondation « AIDE » en Côte d’Ivoire qui œuvre dans le même domaine.
Eugenie GADEDJISSO TOSSOU