SOCIÉTÉ : Quand la césarienne accouche des préjugés mortels
L’accouchement est douloureux. Il l’est encore plus quand c’est par césarienne. Entre cris et pleurs dans la salle de maternité, les sages-femmes ou médecins sont souvent sous pression pour aider la parturiente à accoucher dans de bonnes conditions. Généralement, tout se passe bien jusqu’à ce que la césarienne ne s’impose pour sauver des vies. Pour certaines femmes, un accouchement par césarienne n’est vraiment pas accepté pour être appelé Maman, il le faut par voie basse pour mériter ce titre. Des femmes césarisées font face parfois à des discriminations en famille ou en société.
Une nouvelle maman, est classée à un niveau plus élevé dans la société comme ayant vécu une autre expérience, notamment celle de l’accouchement. Il y a deux types d’accouchement, celui par voie basse ou normal et la césarienne ou l’accouchement assisté. Cette dernière n’est pas la bienvenue chez certaines femmes, comme le témoigne Yawa: « J’avais des soucis avec ma belle-mère et pendant qu’on s’échangeait des mots, elle me dit que c’est son fils et elle a poussé fort avant de l’avoir, ce n’est pas une affaire d’ouvrir le ventre comme on l’a fait pour moi et sortir le bébé, et donc je ne suis pas encore mère pour savoir la souffrance endurer ce jour pour que l’enfant vienne au monde », témoigne-t-elle. Des propos bouleversants pour elle : « J’ai passé toute une journée en larmes jusqu’à retourner à l’hôpital demander au Gynéco si je ne suis pas une mère entière à cause de la césarienne » a-t-elle affirmé.
Tout comme cette jeune maman, Chantal a vécu les mêmes scènes en pleine causerie avec ses amies « on me l’a dit ouvertement, tu n’as pas encore fait l’expérience de la maternité, césarienne c’est rien, il faut aller ouvrir ton entre jambe, expulser le bébé et tu comprendras ce qu’est accouché et tu pourras te faire appeler fièrement maman ». Pour Martine, cette question de césarienne lui rappelle une triste histoire à raconter: « J’ai ma grande sœur qui était enceinte de son premier enfant à 43 ans. Le gynécologue a préconisé une césarienne, mais le jour de l’accouchement, elle s’est rendue dans un autre centre de santé pour contourner la césarienne parce qu’elle veut expulser le bébé d’elle-même, c’est dans cette affaire que nous l’avons perdue avec le bébé », se souvient-elle avec beaucoup de tristesse.
L’accouchement en 4 étapes
Généralement, accoucher se passe en quatre étapes. La durée de chaque étape varie d’une femme à une autre. Lorsqu’une femme enceinte entre en travail, la première étape commence lorsque les contractions régulières se font sentir et qu’elles sont accompagnées de la dilatation ou de l’effacement du col.
La deuxième étape est la descente et la naissance du Bébé, à cette étape commence l’ouverture du col de l’utérus et se termine à la naissance du bébé, un processus qui peut durer 3h pour celles qui accouchent pour la première fois et moins pour celles qui l’ont déjà fait.
L’étape 3 consiste à expulser le placenta. Après la naissance du bébé, l’utérus se contracte et le placenta commence à se décoller. Il est expulsé 5 à 30 min après l’accouchement.
L’étape 4 est la période de rétablissement axé sur le confort et la surveillance de l’état général de la nouvelle maman.
Lorsque toutes ces étapes ne se déroulent pas dans le temps imparti, la santé du bébé et de la mère menacée, une césarienne d’urgence peut être recommandée. Selon Mathieu LABTIONG, assistant médical en gynécologie obstétrique au Centre Hospitalier Régional Kara-Tomdè, « la césarienne est faite pour sauver la vie, soit de l’enfant et/ou de la mère. La césarienne est d’ailleurs même plus douloureuse parce que la cicatrice dure des jours, des mois, voire des années. Tout diffère d’une femme à une autre, or pour l’accouchement par voie basse, juste après l’expulsion du bébé et du placenta, tout se calme ».
La césarienne est de deux types, ajoute-t-il: « Nous avons la césarienne prophylactique qui est programmée parce que vu l’état de santé de la maman et d’autres paramètres pris en compte, la mère ne peut pas accoucher et il faut une césarienne pour sortir le bébé. Pour le 2ᵉ cas, c’est une affaire d’urgence et il faut agir pour sauver des vies », renseigne-t-il. Ce qui veut dire, que les douleurs de contractions sont également connues par certaines femmes césarisées en urgence.
Pour celles qui ont fait l’expérience des deux types d’accouchement, la césarienne n’est pas du tout aisée comme l’explique Mazalo qui a accouché deux fois de suite par voie basse et son 3e enfant est né par césarienne une semaine déjà: « c’est vraiment compliqué avec la césarienne, je n’arrive même pas à prendre le bébé, habiller l’enfant et aussi faire la lessive. Depuis une semaine déjà, je ne me lave pas, il faut qu’on me nettoie, je n’arrive même pas à marcher, je me demande jusqu’à quand ? Je me rends compte que pour mes deux premières filles, c’était un jeu de quelques heures», conclue-t-elle.
Aujourd’hui, c’est vrai que certaines femmes, par peur des douleurs des contractions, choisissent librement l’accouchement par césarienne. C’est leur option et d’ailleurs leur corps. Des vies ont été sauvées grâce à la césarienne et d’autres basculées à force de vouloir accoucher par voie basse. Les leaders religieux, les leaders communautaires doivent intensifier les sensibilisations pour mettre fin à ces clichés.
Espoire TAWI