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DOSSIER: des enfants domestiques, des adultes avant l’âge

Des enfants de gré ou de force deviennent travailleuses domestiques avant l'âge adulte. Pour la plupart de ces êtres innocents, aller à l'école, se soigner, se nourrir, s'habiller et aussi se divertir, relève du quotidien. Malheureusement, celles-ci, pour la plupart, issus des familles nombreuses ou défavorisées, se retrouvent dans la peau de personnes âgées. Ces filles partent des zones rurales pour travailler afin d’assurer leur avenir parfois incertain.

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Arrivée dans un monde inconnu

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Elles prennent leur destin en main depuis leur très jeune âge.  Volontairement ou involontairement, elles partent, laissant tout derrière elles, à la recherche d’un monde meilleur, servir dans les maisons des plus nanties comme domestiques ou même vendeuses ambulantes. À Lomé, dans le quartier Cacavéli, les pleurs d’une fille, vêtue d’une robe bleue décolorée, cheveux coupés, transportant des ananas nous alertent. La petite Mathilde, âgée de 12 ans, a perdu 300 francs CFA de la vente des fruits, difficile de retourner à la maison sans cette somme. Venue de Kpélé, elle travaille chez une dame : « je fais déjà deux ans chez maman. Je vends des fruits en fonction des saisons, ça peut être des ananas, des oranges ou des bananes. Quand les fruits se font rares, je vends Pur Water aux feux tricolores », raconte-t-elle. Ces pleurs sont le signe des brimades, des tortures qu’elle subissait quotidiennement: « si je rentre sans les 300 francs, maman va me taper et je ne vais pas manger le soir. Elle m’a une fois avertit », ajoute-t-elle.

 Akoss, avait une vie tranquille chez elle à Namon, dans la préfecture de Bassar. Cette année scolaire s’est achevée sans qu’elle n’y mette pieds. Elle arrête ainsi, ses études seulement en 5ᵉ: « Mes parents m’informent un matin que je devrais partir travailler. J’avais arrêté l’école parce que papa n’avait plus les moyens. Avec une autre, nous arrivons à Lomé. L’autre, a eu la chance de retourner au village puisqu’elle ne comprenait aucune langue, et moi, je suis là à faire tous les travaux domestiques… », affirme-t-elle.  Tchilalo, elle, sillonne les rues de Lomé 7 jours sur 7 pour vendre du jus avec sa sœur aînée.  Elle vient de Tchamba une ville de la région centrale : « Notre maman est partie au Nigéria pour travailler, la nouvelle épouse de papa ne nous donne pas le temps. C’est de là qu’une maman est venue discuter avec papa et nous a amenées à Lomé qu’ici serait mieux. Nous sommes arrivées et à peine une semaine, tout a changé. C’est plus compliqué pour nous qu’au village. Même si on ne mangeait pas vraiment, on jouait avec nos amies », nous raconte-t-elle, pleine d’émotion.

 

Travailler trop tôt mais à quel prix ?

Ces filles qui travaillent avant leur maturité souvent ne savent pas le prix de leur sacrifice, elles travaillent sans relâche et pour certains, ce sont les parents qui reçoivent l’argent de leur travail. Akoss par exemple, ne sait pas combien elle gagne: « Je fais plus d’un an ici. C’est au moment de retourner au village que mes parents prendront l’argent. C’est ce que maman ici m’a dit», nous confie-t-elle. Pour Mathilde qui vend des fruits, sa patronne lui a proposé une tontine « peu importe ce que je vends et combien je vends dans la journée, maman a dit qu’elle fait tontine pour moi, 100F par jour mais je n’ai aucun moyen de vérifier si elle le fait vraiment ou pas, par jour, je peux vendre jusqu’à 5000F », affirme-t-elle.   Tchilalo et sa sœur sont payées à 12 000F le mois soit 24 000 pour les 2 « c’est à ce prix que nous sommes venues ici », lance la petite Tchilalo en sanglot avant d’ajouter « à la fin de chaque mois, on envoie l’argent à papa mais il ne nous appelle jamais pour voir comment on va. Quand on est malade et on nous achète un médicament de 100F chez les bonnes dames, à la fin du mois, elle retire ça de notre paye », a-t-elle ajouté. Ces enfants qui devraient être à l’école se retrouvent malheureusement déjà à faire un travail précaire.

 

Des OSC aux aguets

Le phénomène des enfants domestiques est réel au Togo. Au départ, c’étaient des placements d’enfants mais aujourd’hui, ils présentent un autre aspect qui est le travail de ‘bonnes’. À l’agence WELCOME, structure de placement des aides ménagères, les petites bonnes ne sont pas les bienvenues. « La loi a identifié le travail des domestiques comme une pire forme de travail et donc les enfants ne sont pas acceptés. Lorsque des parents viennent vers nous avec leurs enfants qu’ils souhaitent placer dans les familles, on ne les rejette pas systématiquement parce qu’ils iront ailleurs puisque leur objectif n’est pas atteint. Nous engageons des discussions avec eux pour leur expliquer l’intérêt de retourner à la maison avec l’enfant et de le scolariser », a expliqué Sylvestre ASSIAH Directeur de l’agence Welcome.

Du côté de l’ONG Creuset-Togo, plusieurs facteurs expliquent le phénomène :« il y a d’abord une croyance comme quoi, le métier de bonne paie suffisamment en ville, la deuxième cause c’est la situation précaire des familles des jeunes filles, La troisième raison est le décès des parents ou la séparation des parents. La quatrième raison, c’est tout simplement l’envie de vivre en ville et pour cela, les jeunes filles choisissent de travailler comme des domestiques», a affirmé LAWSON Kayissan Yayra, Psychologue clinicienne à Creuset-Togo. Elle exprime en outre que « le manque d’occupation ou de centre de formation dans les milieux ruraux pour les jeunes déscolarisés ou non scolarisés» est une autre raison, ainsi que certaines pratiques ancestrales du milieu rural comme le mariage forcé ».

 

Désenclaver les villages, l’autre solution

Les villages et même parfois certaines villes au Togo comme dans plusieurs pays africains manquent d’infrastructures. Pour avoir une meilleure qualité de vie et découvrir le monde, il faut venir dans les grandes villes. Cela amène certaines volontairement à venir travailler comme domestique dans les grandes villes.

Pour maintenir les enfants dans leur milieu d’habitation, Creuset-Togo propose:

–  rééduquer les jeunes à travers des sensibilisations de masse sur les réalités de la vie en ville,

– concevoir des programmes d’aide aux familles et les doter de moyens pour une activité génératrice de revenus,

–  aider les jeunes à concevoir des plans de développement et des projets de vie qui seront financés par l’État pour déconstruire l’idée selon laquelle le bonheur se trouve seulement en ville,

– encourager davantage la scolarisation des jeunes filles et la recherche d’excellence,

-lutter efficacement contre les violences basées sur le genre et surtout les pratiques culturelles qui endiguent le développement harmonieux des jeunes filles, les réduisant à des êtres faibles juste bons pour le foyer.

L’Afrique subsaharienne dénombre le plus d’enfants victimes du travail forcé, 86,6 millions d’enfants, soit 1 enfant sur 4, est concerné, selon un rapport de l’UNICEF. Le Togo s’est engagé à mettre fin au travail des enfants d’ici à 2025, dans le cadre des Objectifs de développement durable de l’ONU. Plusieurs accords et protocoles sont adoptés par l’État togolais mais la mise en œuvre rencontre des résistances qui laissent encore des centaines de milliers d’enfants toujours en bas de l’échelle, surtout la petite fille dont l’enfance est volée par les adultes nantis.

Espoire TAWI

 

VIOLENCE
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