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Togo-Tchoukoutou : les femmes, garantes d’une tradition dans la calebasse

Produite à base du mil ou du sorgho, Tchoukoutou ou Tchouk est la boisson locale la plus populaire dans la partie septentrionale du Togo. Avec une couleur café et sa saveur unique, Tchoukoutou a conquis les cœurs des populations et s’est répandue sur l’ensemble du territoire, mais son fief reste le Nord du pays. Sa préparation et sa vente permettent à des femmes de nourrir des familles entières.

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Originaire du Nord -Togo, cette boisson est présente dans tous les coins et recoins du Togo grâce aux femmes qui se sont déplacées et résident dans les différentes localités sur l’ensemble du territoire national. Avec un processus de préparation complexe, seules les femmes qui en ont la maîtrise, et le secret la préparent.

 

7 jours pour le Tchouk

 

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Cécile, la cinquantaine et mère de quatre enfants, réside dans le quartier Tchaloudè à Kara. Nous avons pris rendez-vous avec elle un jeudi. Nous arrivons dans le quartier, et demandons d’après maman Cécile ‘Tchoukoutou-dou’ ce qui signifie en français la “vendeuse de tchoukoutou” et nous fîmes diriger vers sa demeure. Sa popularité dans ce quartier est simplement liée à son activité génératrice de revenus.

À l’entrée de sa demeure, les odeurs de mil, de boisson et de fumée nous souhaitent la bienvenue. Dame Cécile, en pantalon noir, t-shirt bleu et un foulard sur la tête, nous accueille et nous installe sur un banc, dans un coin de ce que nous pouvons nommer sans exagération ” l’usine de production”. Elle explique que cela fait exactement 35 ans qu’elle prépare et commercialise Tchouk. Aujourd’hui, jeudi, elle est à la seconde préparation, il s’agit de la boisson qui sera vendue le samedi. Mais il y a tout un processus à suivre avant d’arriver à cette étape.

Je dis avec fierté que j’ai mangé dans la boisson

D’abord, la matière première, notamment le mil ou le sorgho, le bois de chauffe et l’eau. Pour une boisson prévue le dimanche, le processus commence sept jours avant. Le mil ou le sorgho est d’abord trempé dans l’eau le soir, et le lendemain matin, on procède au nettoyage des céréales. Quand elles sont vraiment imbibées et la germination commence, elles sont étalées sur des bâches dans un endroit propre et bien couvert. Il faut s’assurer qu’effectivement la germination est en cours, précise dame Cécile: « Chaque jour, il faut vérifier et arroser de l’eau au besoin pour que le mil germe bien. Le 3e jour, le mil germé est ramassé et envoyé au moulin. Au retour, c’est une autre étape : la préparation proprement dite. Il faut étaler la farine ramenée du moulin dans l’objectif de la laisser refroidir. Ensuite, ramasser et délayer dans une grande marmite et laisser décanter. On va recueillir l’eau dessus et déposer, on met le feu et c’est parti, il faut de temps en temps remuer pour éviter que le fond ne se coagule, Continuer jusqu’à bouillir. Il faut, à la fin, enlever la solution obtenue et remettre dans un panier pour recueillir le liquide en dessous. C’est ce liquide qui est mélangé à celui qui a été recueilli avant de mettre le feu », explique dame Cécile.

 

Tchoukoutou au premier jour.

 

Les deux liquides combinés permettent d’avoir un goût aigre après 6h de temps, ce qui fait que le lendemain matin, il faut à nouveau mettre le feu pour la dernière cuisson, qui peut prendre 4 à 5H de temps. Enfin, il faut laisser tiédir et ajouter la lie qui favorise la fermentation (5h) et c’est bon maintenant pour la commercialisation, le processus dure sept jours, a-t-elle détaillé.

Boisson tchoukoutchou prête à vendre.

 

Dame Bernadette, elle aussi, est revendeuse de Tchouk depuis 5 ans déjà: « Ce travail, je le fais depuis le décès de mon mari en décembre 2018 avec 4 enfants sous la main. Je n’avais pas d’autre choix que de faire du Tchouk pour subvenir aux besoins de mes enfants. Aujourd’hui, si nous arrivons à manger, c’est grâce à cela. Je vends deux fois par semaine, les jeudis et samedis ».

 

Du bon Tchouk avec une bonne soupe, je crée mon paradis sur terre

 

Dame Solim quant à elle est une véritable machine à production, elle vend sa boisson 6 jours sur 7 « c’est mon métier, c’est ce que je mange, c’est ce que je bois. C’est la vente de Tchouk qui m’a permis d’avoir des moyens pour vendre du bois de chauffe que je commande depuis les villages, j’ai également un moulin. Je dis avec fierté que j’ai mangée dans la boisson», lance-t-elle avec un sourire.

Dans la préparation de Tchouk, ces femmes sont exposées au feu ardent. Elles essuient des larmes, non pas par tristesse, mais à cause de la fumée: « Je me fais aider par des jeunes filles du quartier au besoin, elles viennent puiser l’eau, apprêter les bois de chauffe, aller au moulin. Moi seule, je ne peux plus le faire, je prends de l’âge, bientôt 59 ans », nous a confié dame Solim.

quand j’ai faim et je prends ça, tout se calme

Le Tchouk, plus qu’une boisson pour ses consommateurs

La boisson locale Tchoukoutou est vendue dans les cabarets, sous les appâtâmes de fortune au bord de route et également dans les marchés ou à domicile selon l’espace disponible pour accueillir les potentiels clients. Les prix sont abordables, confie dame Cécile : « Avant, la calebasse était à 50F, mais aujourd’hui tout est devenu cher et nous servons la calebasse à 100F, la bouteille de 1,5 litre est à 400F et le bidon de 25 l est à 6 000F ». Sous les cabarets, ou encore les appâtâmes de fortune, les jeunes hommes comme femmes en raffolent après une bonne journée de travail.

Signe pour signaler la disponibilité de la boisson dans les parages.

Dame Valérie est une fière consommatrice: « Le Tchouk permet de bien dormir le soir. En journée, quand j’ai faim et je prends ça, tout se calme et moi-même, je suis tranquille pour travailler ». Quant à Essowè, c’est la bonne bière: « Si j’ai une bonne boisson Tchoukoutou, je la préfère même que celle moderne embouteillée. Ici, on sait que c’est l’eau du mil. Lorsque vous prenez la boisson locale dans un peu d’ambiance avec les amis et collègues, ça renforce les liens. Du bon Tchouk avec une bonne soupe, je crée mon paradis sur terre », a-t-il confié.
La boisson locale Tchoukoutou est aussi recommandée lors des évènements heureux ou malheureux : des fêtes traditionnelles, les cérémonies de deuil, de dot ou de mariage. Le travail de préparation étant rude, les outils de préparations, notamment le feu utilisé, ayant un grand impact sur la santé de ces femmes, penser à des foyers améliorés pour elles peut aussi aider.

 

 

Espoire TAWI

 

 

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